A l’annonce du bilan, c’est le choc : vous ou votre partenaire êtes infertile. Cela ne veut pas dire que vous êtes stérile, mais que vos chances d’avoir un enfant sont réduites. Un couple dans l’attente d’un enfant, notamment s’il entre en PMA (Procréation Médicalement Assistée) voit son état psychologique chamboulé. Un état si particulier expliqué par Déborah Schouhmann-Antonio dans son livre Infertilité: mon guide vers l’espoir.
Les différents sentiments qui font suite au diagnostic
Les couples peuvent passer par différentes étapes après l’annonce du diagnostic. Cela commence souvent par un déni, puis par des questionnements, une remise en question de soi-même voire un sentiment d’inutilité au sein du couple. Souvent, ils laissent place à la culpabilité pour la personne infertile : je ne suis pas capable de rendre mon/ma conjoint-e heureux-se, de lui donner l’enfant qu’il/elle veut tant. Pourtant, d’après Joëlle Desjardins-Simon*, psychanalyste dans un service de PMA, les deux conjoints sont souvent responsables. L’infertilité peut être causée par un problème physique chez l’un, et psychologique, tout-à-fait inconscient, chez l’autre. Il n’est pas rare de voir une personne ayant subi un traumatisme ou un choc dont la plaie, encore ouverte, va engendrer un refus inconscient de tomber enceinte. Cette personne va alors souvent, sans le savoir, choisir un partenaire infertile. Un travail avec un psychologue peut s’avérer efficace.
Benjamin, 35 ans, témoignage tiré du livre Infertilité : mon guide vers l’espoir
« Quand on m’a annoncé que j’avais peu de spermatozoïdes, et qu’ils étaient fainéants, j’ai ressenti une honte incroyable. J’étais le responsable, celui qui rend malheureux sa femme, parce qu’elle a besoin de cet enfant pour être totalement heureuse. Et en plus, il fallait que ma femme supporte des traitements dont elle n’avait pas besoin puisqu’elle n’a rien… J’ai vraiment ressenti le poids de la culpabilité ce jour-là, malgré les mots bienveillants de ma conjointe. »
Une autre part importante de l’état d’esprit d’un couple en difficulté d’enfanter est l’omniprésence du désir d’enfant. La vie quotidienne du couple est mise entre parenthèses pour laisser place au bébé qui peut potentiellement arriver à tout moment. Les opportunités de changer de travail, de voyager, de lancer son activité… se voient remises à plus tard. Attention à ne pas s’oublier dans ce combat ! Cette obsession a aussi un impact sur la vie sexuelle du couple, surtout lorsque celui-ci suit une PMA. Les rapports sexuels sont programmés dans un but non pas érotique mais reproductif. La pression peut finir par diminuer la libido des deux conjoints à qui il est conseillé de ne pas sous-estimer l’importance de la séduction et des rapports spontanés et chaleureux, hors des procédures de PMA. De plus, chez les femmes, cette incapacité d’enfanter est souvent vue comme une part de leur féminité qui leur est retirée. Chez les hommes, c’est la virilité qui est touchée.
Notons aussi que ces sentiments sont intensifiés par l’instabilité et la répétition des cycles de la femmes qui engendrent par conséquent la répétition d’échecs et de nouveaux espoirs chaque mois. C’est le grand huit des émotions et des déceptions avant le grand bonheur, pour les chanceux.
Le recours à la PMA et ses conséquences sur le couple
Après de nombreuses tentatives infructueuses, le couple souhaitant avoir un bébé peut se tourner vers la médecine pour obtenir un coup de pouce. Plusieurs techniques sont aujourd’hui utilisées : insémination artificielle (IAC), fécondation in vitro (FIV), don de sperme… Le plus souvent, c’est un chemin assez difficile à traverser pour le corps comme pour l’esprit. Les deux futurs parents font face à de nombreux tests, rendez-vous médicaux, injections, prises de sang et autres analyses. C’est pour cela qu’il est important de réfléchir sérieusement avant de commencer cette procédure. En effet, c’est principalement l’intimité qui est mise à mal : vos rapports sexuels sont programmés et décortiqués et votre corps est, littéralement, mis à nu. A savoir : les hormones administrées à la femme peuvent provoquer les mêmes symptômes qu’une grossesse (crampes, poitrine douloureuse…). Il faut donc faire attention et apprendre à reconnaître ces signes pour ne pas engendrer de faux-espoirs. La PMA fonctionne pour 50% des couples ayant fait le choix de ce parcours. Certes, ce n’est pas énorme mais l’espoir est bel et bien là. Pour la vivre au mieux, assurez-vous d’être organisés et surtout, d’en avoir réellement envie tous les deux.
Les couples qui peinent à avoir un enfant de façon naturelle sont donc dans un état d’esprit très particulier, qu’il est parfois difficile de comprendre pour l’entourage. Mais je ne peux terminer cet article sans citer Déborah Schouhmann-Antonio :
« Le bonheur ne se résume pas au fait d’avoir des enfants. Avoir des enfants est un bonheur en plus qui vient s’ajouter à tous les petits et grands bonheurs de la vie. C’est pourquoi il faut apprendre à s’écouter, à se faire plaisir et élargir son champ de pensée et à s’autoriser à voir les choses d’une autre manière. Vous ne serez pas plus heureux en devenant parents, vous découvrirez une autre forme de bonheur. […] Tout ne sera pas acceptable, tout ne sera pas à votre portée. Accepter de dire non parfois, c’est fermer une porte, mais s’ouvrir un autre chemin. Il n’y a pas de bons ou de mauvais choix, il ne doit y avoir que des chemins qui soient pleinement les vôtres, pleinement en accord avec vous. »
Si je souhaite du courage à ceux qui traversent ces étapes, je souhaite aussi et surtout énormément de bonheurs à tous, dans chaque petit et grand moment de la vie !
Elodie Gindrier
Sources :
Livre :
Infertilité : mon guide vers l’espoir de Déborah Schouhmann-Antonio
Externe :
* Interview complète de Joëlle Desjardins-Simon : https://www.magicmaman.com/,infertilite-et-psychologie,3372936.asp